"Je pensais que c’était un pédophile" : ils enlèvent et tabassent un adolescent pour lui extorquer des aveux d’agression sexuelle sur la sœur de l’un d’eux - ladepeche.fr


Two friends in Pamiers, France, kidnapped and assaulted a teenager, falsely accusing him of sexual assault on one's sister, resulting in their convictions.
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l'essentiel Avaient-ils tout prévu ou les choses ont-elles dérapé en chemin ? Deux amis d’enfance, habitants de Pamiers, comparaissaient à Foix pour un enlèvement et des violences sur un troisième qu’ils accusaient d’agression sexuelle.

Quelques petits rires secouent la salle du tribunal de Foix quand Rida, visage fin et torse moulé dans un t-shirt blanc dans le box des accusés, s’écrit : "Non mais je vais tout vous expliquer de A à Z, madame." Il poursuit, laissant une pause presque théâtrale entre chaque mot : "J’ai frappé… Enlevé… Séquestré… Frappé encore". Le silence se fait soudainement dans l’audience face à la gravité des faits que le jeune homme de 27 ans reconnaît, d’un ton péremptoire.

Rida n’est pas le seul prévenu pour cette comparution immédiate sur des faits de séquestration, enlèvement, de violences et de menaces, le tout avec préméditation et en réunion ; comparaissant libre, il y a aussi Yannis, 21 ans, droit comme un I dans son son survêtement devant les juges. Et leur victime, Paul, est là, entouré de ses proches sur les bancs dans la salle, revivant au fur et à mesure du récit sa soirée du 10 mai dernier.

Samedi dernier donc, il est 2 heures du matin quand la mère de Paul appelle le commissariat de Pamiers, en panique. Un ami de son fils l’a contactée, l’alertant que le jeune homme de 15 ans a été enlevé par trois personnes dans une Clio blanche après avoir été frappé dans une ruelle du centre-ville. Le bornage du téléphone indique aux forces de l’ordre que Paul se trouve à La Bastide-de-Lordat, où ils se rendent ; c’est alors qu’ils sont contactés par le peloton d’intervention de la gendarmerie, qui a intercepté ladite Clio avec les quatre à l’intérieur.

"C’était pratique de laisser votre ami commettre les violences"

Le but de cette expédition punitive ? Que Paul reconnaisse des attouchements sur la petite sœur de Yanis, ce qu’il a fini par faire dans une vidéo après avoir été passé à tabac dans un champ de Saint-Amadou ; si une plainte avait été déposée, la procédure avait été classée sans suite. Devant les juges, Yanis se répand en excuses : "Je regrette ce que j’ai fait, je regrette d’avoir fait justice moi-même, je promets de plus rentrer en contact avec lui de toute ma vie." Le jeune homme peint une scène où rien n’a été réfléchi : "Quand on l’a croisé, c’était l’énervement. On voulait juste parler, je pensais pas que ça irait aussi loin", plaide-t-il.

Mais son ton quelque peu guindé, tout comme sa sémantique, ne manquent pas de faire tiquer la présidente du jury, Pauline Chaulet. "Les violences sont arrivées, il est venu avec vous, il est sorti de la voiture tout seul… À vous écouter, c’est comme s’il avait le choix et que vous n’aviez rien fait", souligne-t-elle. Tout comme elle remarque que "c’était pratique de laisser votre ami commettre les violences pour arriver à ce que vous vouliez, en laissant un autre faire."

Ces violences, Rida les revendique haut et fort à la barre, quand ils les contestaient jusque-là en garde à vue. "J’ai pété les plombs quand Yanis m’a tout raconté le soir des faits, raconte-t-il. J’ai dit, on le cherche." Le Gersois ponctue toutes ses phrases d’un "OK", claque la langue, agite le micro dans tous les sens. "Yanis et l’autre, ils étaient pas au courant que ce que j’allais faire, même moi j’en étais pas sûr ! Mais dans tous les cas j’allais le frapper", lance-t-il, sous les yeux éberlués, voire amusés des magistrats.

Il n’y a que quand Rida raconte avoir appris fortuitement qu’il avait frappé un mineur, et non un majeur comme il le pensait initialement, qu’il esquisse un début de mea culpa. "Il faisait 2 mètres de haut, j’y ai cru moi quand ils m’ont dit qu’il avait 18 ans !" "Et si c’était un adulte, ça aurait excusé que vous le frappiez ?" l’interroge la présidente, incrédule. "Non, mais…" Le jeune homme étire longuement son "mais", ce qui n’échappe pas à la cour : "La décontraction avec laquelle vous abordez les faits est déconcertante", lâche, dépitée, la magistrate. "Je pensais que c’était un pédophile", s’agace-t-il. "Quand même, était-ce à vous de faire quelque chose ?", martèle la juge. "Non, mais OK, je l’ai fait, je regrette d’avoir enlevé un mineur", concède Rida, l’air boudeur.

3 condamnations chacun

Des excuses qui ne passent pas du côté de Maître Delrieu, avocate des parties civiles. "On s’excuse pour les besoins de la cause, à demi-mot, mais j’ai du mal à croire qu’on ne s’est pas entendu avant, tonne-t-elle. Quand on a fait les cow-boys comme ils l’ont fait, qui croira qu’aujourd’hui ils regrettent ?"

Le procureur, Benoit de Saintignon, n’est pas plus tendre face à cette "volonté de substituer au service d’enquête" : comme Maître Delrieu, il souligne "la part entière de responsabilité dans les faits" des deux. Toutefois, il demande une peine plus légère – 12 mois de prison – pour Yanis, déjà condamné à 3 reprises pour des violences ou une subornation de témoin, mais qui a fait preuve de sérieux lors de son travail d’intérêt général et en voie d’obtenir un CDI dans une entreprise ; pour Rida, 3 fois condamné aussi pour du vol et moins bien inséré socialement, le magistrat requiert 18 mois d’incarcération.

Une distinction que condamne Maître Andrieu, défenseur de Rida : "À qui profite le crime ? Qui avait envie de se venger ?", s’interroge-t-elle. Pour elle, Yanis connaissait la loyauté de son client envers lui et sa sœur, qu’il considérait comme sa fratrie : "Je ne pense pas qu’il soit l’instigateur des faits et on ne peut pas le laisser prendre l’entièreté de la responsabilité", s’insurge-t-elle.

A contrario, Maître Obis, en défense de Yanis, s’attache à montrer que Rida avait l’ascendant sur le jeune homme : "Yanis n’avait pas la haine, la famille n’était même au courant du classement sans suite !", s’exclame-t-elle. Dépeignant son client comme "n’ayant pas bougé une oreille" depuis sa dernière condamnation, l’avocate pointe du doigt l’intervention d’un tiers pour expliquer pourquoi tout a dérapé : "Rida a donné les directives, tout le monde a été dépassé par son comportement."

Finalement, le tribunal prononcera une peine conforme aux demandes du procureur : 12 mois de prison pour Yanis, dont une partie de sursis révoqué, et 18 mois ferme, dont 6 mois de sursis probatoire, pour Rida. Les deux devront indemniser leur victime, avec laquelle ils ne pourront pas entrer en contact.

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