Il voue un véritable culte à Donald Trump, rêve de reconstituer la "Grande Roumanie" au détriment de ses voisins moldave et ukrainien, critique l’aide européenne à Kiev et accuse Bruxelles de vouloir forcer les Roumains à manger des insectes. Sorti largement victorieux du premier tour du scrutin présidentiel, ce 4 mai, avec plus de 40 % des voix, George Simion, candidat d’extrême droite, sera peut-être le prochain président de la Roumanie s’il parvient à vaincre Nicusor Dan, le 18 mai prochain. Car le maire de Bucarest, mathématicien de formation, a beau compter et recompter ses voix, il atteint péniblement 21 % des votes, un retard qui sera très difficile à rattraper en deux semaines. Simion président de la Roumanie ? Cette perspective donne déjà des maux de tête aux grands dirigeants occidentaux, tant ses positions radicales risquent de bouleverser l’échiquier européen.
Né à Focsani, dans les Carpates roumaines, George Simion, un économiste de 38 ans, n’est pas un novice en politique. Antivax, opposé au mariage homosexuel et ultranationaliste, il crée en 2019 l’Alliance pour l’unité des Roumains (Aur). En novembre 2024, ce candidat antisystème arrive quatrième au premier tour de l’élection présidentielle – mais le scrutin est annulé après des accusations d’ingérence russe. Cinq mois plus tard, après le retrait du candidat populiste et pro russe Calin Goergescu, il se retrouve donc en tête de la course présidentielle.
Panique dans les chancelleries européennes. S’il conquiert le Palais Cotroceni, "l’Élysée roumain", George Simion pourrait mettre la pagaille à Bruxelles. Dans le système politique roumain, c’est en effet le président qui mène la politique étrangère. Anti-ukrainien, ce conservateur affirmé est fasciné par l’idéologie trumpiste, comme le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán. "Je suis le seul à avoir des contacts avec l’administration Trump", a récemment déclaré Simion au média ultra-conservateur américain Breitbar. "Nous [le parti Aur] partageons idéologiquement la même vision que le mouvement MAGA. Vous pouvez me considérer comme un candidat MAGA – le seul candidat MAGA aux élections roumaines."
Sa volonté de "rendre sa grandeur à la Roumanie" trouve un certain écho dans la population. "Une grande partie de l’establishment roumain place ses espoirs en lui, affirme, à Bucarest, Armand Gosu, analyste politique, spécialiste de l’espace post-soviétique. Après deux décennies passées dans l’UE et dans l’Otan, une partie de l’élite roumaine, issue de l’ancienne nomenklatura communiste (services secrets, système judiciaire), est déçue, car elle estime qu’elle n’a pas reçu assez de l’Occident. Ces frustrations se traduisent par une attirance envers des mouvements politiques antioccidentaux, comme celui dirigé par George Simion." Selon les premiers résultats, le vainqueur du premier tour a largement séduit la diaspora roumaine vivant en Europe de l’Ouest.
"Make Romania great again" ? Le concept va plaire aux nostalgiques de Romania Mare, le royaume de Roumanie, qui a connu son apogée territorial durant l’entre-deux-guerres. Et l’on a des raisons de penser que George Simion est sérieux lorsqu’il évoque ce fantasme géopolitique. "Dans la première partie de sa carrière politique, il a conduit un mouvement unioniste, précise Armand Gosu. Il a été particulièrement actif en Moldavie, où son implication a fait le jeu de la Russie. Au point qu’aujourd’hui, George Simion est persona non grata dans ce pays ! Il s’est également prononcé en faveur d’une division de l’Ukraine. Dans son projet, la Roumanie recevrait le nord de la Bucovine et une partie de la région d’Odessa, territoires qui faisaient partie de la Grande Roumanie. S’il devient président, il sera très compliqué pour la Moldavie et l’Ukraine de maintenir un dialogue politique avec la Roumanie. Cette bombe à retardement, placée sur le flanc oriental de l’Otan et de l’UE, pourra exploser à tout moment…" Rappelons que la Roumanie, pièce maîtresse du dispositif de l’Alliance atlantique de l’est-européen, abrite deux bases de l’Otan, un bouclier antimissile et des milliers de soldats américains et français. Autant dire que les premières déclarations de Simion, s’il est élu le 18 mai, seront particulièrement scrutées dans les états-majors occidentaux.
Faut-il donc craindre le pire ? Pas forcément, selon l’analyste politique Radu Magdin. "Aussi radical soit-il, George Simion pourrait, une fois en exercice, se normaliser, en suivant l’exemple de la cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni". Après tout, les deux leaders appartiennent au même groupe politique, les Conservateurs et réformistes européens. Et Simion lui voue une certaine admiration, comme il l’a confessé dans l’interview accordée à Breitbar. "Elle a réussi […] à devenir un modèle", a-t-il déclaré. "Je pense que nous aurions une série de dirigeants pro-Trump en Europe qui gagneraient et traiteraient directement avec l’administration Trump", analyse Radu Magdin.
S’il gagne le 18 mai, George Simion, qui s’oppose aux transferts d’armements à l’Ukraine via la Roumanie, devrait en tout cas renforcer à Bruxelles les rangs des trublions. "Il sait que les citoyens roumains ne sont pas favorables à une sortie de l’UE ou de l’Otan, souligne Armand Gosu. Mais il pourrait toutefois suivre le modèle d’Orban et tenter de faire chanter la Commission et le Conseil, quand cela lui semblera nécessaire." Comme s’il n’y en avait pas assez d’un…
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