Pour cette 78e édition du Festival de Cannes, il sera quotidiennement à la table de C à vous (sur France 5) où il est chroniqueur depuis 2014. Le dimanche 18 mai, Pierre Lescure proposera également sur France 2 une spéciale, en plateau, de son émission hebdomadaire Beau Geste, consacrée au 7e art. Rencontre avec un éternel gamin dont l'émerveillement pour la sphère culturelle n'a pas faibli d'un iota.
LA TRIBUNE DIMANCHE - Quel est le menu des festivités pour cette émission spéciale ?PIERRE LESCURE - On sera sur le plateau qui accueille les émissions de France Télévisions, dont C à vous, situé à 150 mètres des marches. Je recevrai une vingtaine de vedettes françaises et internationales. Je serai pendant toute l'émission avec Laurent Lafitte, le maître des cérémonies d'ouverture et de clôture. Ça sera une espèce de Nulle Part ailleurs ou de Grand Journal de Cannes ! [Rires.] Très gai et positif. Je n'ai rien contre les critiques de films. Mais la beauté du cinéma, comme de la musique, de la littérature ou du théâtre, c'est qu'on assiste à un flux permanent d'œuvres. Certes, tout n'est pas au sommet, mais il faut se rendre compte de la chance qu'on a d'être dans un pays avec autant de productions dans tous ces domaines. Profitons-en, nom d'une pipe !
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Quand vous avez lancé Beau Geste en 2023, on ne donnait pas cher de votre peau. Car les émissions de cinéma à la télé, c'est très compliqué...Ce qui ne marche plus, ce sont les émissions de promo premier degré. Dans Beau Geste, on n'est pas là pour annoncer les films qui sortent le mercredi suivant. Les gens du métier parlent de leur passion pour cet art. On va à leur rencontre sous forme notamment de déambulations dans des lieux culturels, comme récemment au musée d'Orsay avec Diane Kruger et Louis Garrel. On était au milieu des œuvres impressionnistes, c'était à tomber ! Et puis on couvre toute la palette du cinéma. On ne fait pas une émission de cinéphiles sourcilleux qui exclurait tous ceux qui ne sont pas dans notre chapelle. Comme lorsque je dirigeais Canal+. On passait des blagues « pipi caca » à des choses beaucoup plus intellectuelles. L'audience moyenne est de 500 000 téléspectateurs, ce qui est très satisfaisant pour une deuxième partie de soirée et au-dessus des objectifs fixés.
Il vous arrive de tutoyer à l'antenne des comédiens, comme Catherine Deneuve. Avez-vous hésité ?Au lancement de l'émission, on s'est posé la question, car on avait peur que cela crée un sentiment de connivence. Mais il aurait été stupide que je me mette à vouvoyer Catherine Deneuve car on a eu une histoire personnelle [ils ont été en couple dans les années 1980]. C'est pareil quand je suis face à Alain Chabat que je connais depuis quarante-cinq ans. Dans l'émission, je ne joue pas au présentateur télé. J'engage un dialogue, comme dans la vraie vie.
Votre tout premier festival remonte à 1979. Quel souvenir gardez-vous de ce « dépucelage » cannois ?Une édition complètement dingo ! Avec une double Palme d'or - Apocalypse Now et Le Tambour - et des merveilles comme Les Moissons du ciel de Terrence Malick ou Série noire d'Alain Corneau. Au moment de repartir, je suis tombé dans le Palais des festivals sur Gilles Jacob, qui était chargé de sélectionner les films. Il m'a dit : « Tu devrais rester pour la clôture, il y a Manhattan, c'est le nouveau Woody Allen. » C'était dément. Pendant tout le Festival, j'animais le soir sur Europe 1 une émission avec Jean-Claude Brialy et Eddy Mitchell. La radio nous avait logés dans une villa sur les hauteurs de Cannes tenue par un couple d'Italiens qui nous préparait des pâtes au milieu de la nuit quand on rentrait. Jean-Claude enfilait sa gandoura que lui avait offerte le roi Hassan II et nous les servait. On avait même « abrité » Isabelle Adjani, qui ne voulait pas se montrer avant la présentation des Sœurs Brontë d'André Téchiné.
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Si vous deviez ne retenir qu'une Palme d'or, laquelle serait-elle ?Au-delà des polémiques autour de son réalisateur, c'est Le Pianiste de Roman Polanski, en 2002. C'était l'un de mes derniers projets à Canal avant de me faire virer par Jean-Marie Messier. Roman Polanski a voulu reconstituer le ghetto de Varsovie et n'user d'aucun effet spécial à l'image afin de montrer sa réalité. Il y a eu aussi Parasite en 2019. Quel culot et quelle liberté extraordinaires ! C'est la première fois qu'un film asiatique dans sa langue originale suscitait une telle unanimité. En tant que président du Festival [il l'a été de 2014 à 2022], j'ai eu le privilège d'assister à la délibération du jury, il y avait un tel enthousiasme dans la salle.
Le Festival, c'est aussi des moments très politiques. Lequel gardez-vous en mémoire ?L'intervention vidéo de Volodymyr Zelensky en 2022 [trois mois après le début de la guerre en Ukraine] m'a beaucoup marqué. Au départ, le public pensait que c'était enregistré, avant de comprendre qu'il était en direct. Tout le monde regardait cet homme avec ce regard très puissant, fiévreux, et cette voix rauque parler avec passion de son pays. Il expliquait qu'il fallait continuer de faire des films pour éclairer les consciences. Mêmes sous les bombes. Il y avait un silence bouleversant.
Plusieurs récents articles ont évoqué des tensions au sein de la rédaction de C à vous. Prenez-vous toujours autant de plaisir ?Ces articles sont basés sur quelques témoignages anonymes de personnes qui ne sont visiblement pas dans les murs et ne reflètent pas du tout l'ambiance dans la rédaction. Bien sûr que fabriquer une émission quotidienne peut être usant, mais la bonne humeur à l'antenne n'est pas feinte. Je prends toujours autant de plaisir. Je pense que je vais continuer à en prendre la saison prochaine même si on n'a pas encore eu le temps d'en discuter formellement avec Pierre-Antoine Capton [le patron de Mediawan, qui produit le talk-show] et Anne-Élisabeth Lemoine.
Vous allez avoir 80 ans en juillet. Comme Michel Drucker, le mot « retraite » vous provoque-t‑il des bouffées d'angoisse ?Je ne sais pas ce que c'est de ne pas travailler. L'info est depuis toujours ma nourriture quotidienne, tout comme le cinéma et la culture. J'ai la chance de continuer à tremper mon sucre dans ces chocolats-là. Mon père a travaillé jusqu'à ses derniers jours à L'Humanité, où il était journaliste. À la fin, il formait les jeunes. La seule chose qui pourrait me faire arrêter une partie de mes activités télé, ce serait de redevenir patron de théâtre. Comme lorsque j'ai dirigé le Théâtre Marigny [entre 2008 et 2013]. Quel bonheur d'être au fond de la salle contre la porte et de regarder les dix premières minutes d'une pièce ! Puis, quand on sent que ça prend, de remonter tout heureux dans son bureau travailler sur la suivante.
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