À 34 ans, Wahbi Khazri vit la seconde relégation en Ligue 2 de sa carrière, après celle déjà subie avec Saint-Étienne en 2022. Et l'international tunisien (74 sélections et 25 buts) la vit mal, blessé par toutes les critiques dont il fait l'objet et qu'il juge un peu trop « faciles ».
« Comment vivez-vous la descente de Montpellier ? Mal. Messieurs (Louis) Nicollin et (Bernard) Gasset ont mis ce club tout en haut (ils en sont les deux fondateurs) et nous, on le fait tomber. Cela fait de la peine. Quand je suis venu (en 2022), le club nourrissait une autre ambition. Mais quand tu effectues des mauvais choix pendant un ou deux ans et que tu affaiblis l'équipe, tu le payes. Des joueurs comme (Stephy) Mavididi et (Elye) Wahi sont partis (respectivement à Leicester, en Angleterre, et à Lens, tous deux en 2023). Valère (Germain, lui aussi parti cette année-là), tu peux le critiquer sur le banc, mais il a été capable de mettre 80 buts en Ligue 1 (61 en 313 matches en réalité). Même si on a parfois manqué de réussite, on n'a que ce que l'on mérite. Montpellier a l'équipe la plus faible de Ligue 1.
La faute revient-elle notamment aux cadres, dont vous faites partie, qui n'ont pas assumé leur rôle ? Les "cadres"... Je n'en suis pas un. En tout cas, je ne suis pas considéré comme tel dans un club où je n'étais pas le bienvenu, pas trop aimé ni désiré. Je le sais. Je l'ai entendu. En interne, deux ou trois personnes étaient contre ma venue. Le président Laurent Nicollin a été l'un des seuls à me soutenir et à me respecter. Je l'adore.
Même s'il aurait bien aimé vous voir partir, afin d'économiser votre gros salaire (180 000 euros brut par mois)... Je peux le comprendre. Mais personne n'est venu me le dire. Pas plus que je n'ai eu de contact direct avec des clubs d'Arabie saoudite. Mon salaire, je ne l'ai pas volé. Je l'ai signé au sortir d'une saison à 10 buts avec Saint-Étienne (en 2021-2022). À Montpellier, au regard du contexte, c'était plus difficile pour moi de m'exprimer. On ne m'en a pas laissé le temps.
« Si vous regardez mes données GPS, vous verrez que je n'ai jamais été en dessous des autres. Notamment dans les courses à haute intensité »
Avez-vous tout entrepris de votre côté, notamment en termes de condition physique ? Un soi-disant coach (Michel Der Zakarian) part, il sort les pistolets et balance des grenades. Vous pensez vraiment qu'avec Téji Savanier, on a 5 voire 8 kilos en trop, pour reprendre ses propos (*) ? Si c'était le cas, tu ne peux pas jouer à ce niveau. On aurait "pété" à tout va. Or, Savanier et moi avons eu zéro blessure musculaire cette saison. Je n'ai raté qu'une ou deux séances d'entraînement, à cause d'une grippe. Je n'ai pas joué la carotte, jamais lâché ni suis arrivé en retard, contrairement à certains. Si vous regardez mes données GPS, vous verrez que je n'ai jamais été en dessous des autres. Notamment dans les courses à haute intensité. Je ne suis pas parfait. Mais quand je vois l'image que l'on me donne, ça me désole. Parlez-moi plutôt de ses performances tactiques.
On vous écoute... On n'a jamais évolué avec une défense à cinq et il nous fait jouer en 5-3-2 lors du deuxième match de la saison, à Paris. On n'a pas compris, on en a pris six, mais personne n'a rien dit (0-6, le 23 août). Cette histoire de poids, c'est juste des excuses. J'aime bien les gens qui parlent en face. Il a lâché sa petite bombe qui ne sert à rien. Sauf à s'en laver les mains.
« Ne me faites pas passer pour le mec qui met la merde »
Avez-vous le sentiment d'être devenu un bouc émissaire ? Je ne fais pas mon Calimero. Mais cette année, tout le monde m'en veut. Dès qu'il y a un problème, c'est de ma faute. Je suis le coupable idéal. Tout est fait pour essayer de me nuire. Par exemple, des photos trafiquées me montrant dans la salle de musculation ont été publiées sur les réseaux sociaux. Quand il les a regardées, (Becir) Omeragic m'a dit : "Tiens, je ne t'avais jamais vu comme ça." M'entendre siffler par tout un stade me fout les boules. Pendant 480 matches (dans toute sa carrière avant cette saison), je n'ai jamais été un en... et là, tout d'un coup, je me dis : "Tiens, je vais en devenir un et faire descendre Montpellier, l'année de son cinquantenaire ?" Ne me faites pas passer pour le mec qui met la merde. Demandez à "Toto" (Sébastien) Squillaci à Bastia, à Jermain Defoe à Sunderland, à Benjamin André à Rennes et à bien d'autres comment je me comporte dans un vestiaire.
Y compris avec les jeunes ? Je suis trop dur avec eux ? Allez poser la question à William Saliba, à Lucas Gourna-Douath ou à Wesley Fofana, tous dans de grands clubs aujourd'hui, si je les ai aidés ou tirés vers le bas.
Reconnaissez-vous tout de même une part de responsabilité ? Sur le terrain, on n'a pas fait le boulot. Je suis prêt à assumer quand je n'ai pas été bon. Mais si je prends le nombre total de minutes jouées, je n'en compte pas beaucoup (10 titularisations). J'avais pourtant réussi une super préparation d'avant-saison, à 5 ou 6 buts. Elle n'a servi à rien. Je n'ai jamais joué à mon poste ni eu le retour que j'espérais. Je ressens un sentiment d'injustice car j'ai été titulaire lors de trois de nos quatre victoires, contre Brest (3-1, le 10 novembre), Monaco et à Toulouse (2-1 à chaque fois, les 17 et 26 janvier). Je ne l'ai plus été par la suite, sans savoir pourquoi.
Le club descend et on rejette la faute sur moi. C'est trop facile de toujours tirer sur les mêmes et de me faire passer pour le méchant de service. Certaines personnes, chacune dans son registre, n'ont pas assumé leur incompétence et leur niveau. Ce serait bien que tout le monde le reconnaisse. Y compris les joueurs qui vont rester au club. S'ils veulent faire une carrière.
« On n'a pas existé dans les matches couperets et on s'est laissés bouffer dans ceux importants »
Avez-vous une mauvaise influence sur Téji Savanier ? Je le prends à la rigolade. C'est vrai qu'on s'entend bien. Mais Téji est un grand garçon et il a du caractère. Il n'a besoin de personne. Encore moins de moi. Avec Jordan Ferri, Benjamin Lecomte et Savanier qui, eux, ont joué tous les matches, on a le dos large. Mais il ne faut pas exagérer.
Comprenez-vous que l'état d'esprit des anciens soit jugé trop dilettante ? Le football, ce n'est pas qu'une question de bande de copains. C'est surtout un problème de niveau. On n'a pas existé dans les matches couperets et on s'est laissés bouffer dans ceux importants, contre Angers, Saint-Étienne et Le Havre (concurrents directs pour le maintien).
Libre au 30 juin, allez-vous mettre un terme à votre carrière ? Non. Je veux continuer à jouer pour rendre des services. Je suis droit dans mes bottes et je sais l'homme que je suis. »
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