The article features an interview with former Belgian Prime Minister Alexander De Croo, who expresses concern about Europe's position in the face of growing nationalism and the changing geopolitical landscape. He highlights the risk of Europe being reshaped without its active participation in international negotiations.
De Croo discusses the impact of Donald Trump's foreign policy, particularly the exclusion of Europe from US-Russia talks. He criticizes the lack of a cohesive European response to these developments and advocates for a clear, unified approach.
The interview also touches on Belgium's domestic politics, noting the rise of nationalist parties and the formation of a new coalition government. De Croo reflects on his own political career and the challenges faced by liberal parties across Europe.
De Croo believes that the pressure on Europe can be seen as an opportunity. He points to the increased momentum towards economic reforms and greater defense cooperation within the EU. He emphasizes the importance of clear communication and a pragmatic approach for liberal parties to overcome the challenges posed by populist movements.
The interview concludes with De Croo's optimistic outlook for the future despite the considerable challenges. He highlights the need for strong partnerships beyond the US, especially with Africa, and the opportunities presented by new technologies such as artificial intelligence.
Alexander De Croo entre dans le restaurant, La Belle Maraîchère, avec l’air d’un homme d’affaires venu prendre son déjeuner rapide du lundi plus que d’un ancien Premier ministre qui vient de passer une semaine à débattre du bourbier géopolitique actuel de l’Europe [cet entretien a paru le 21 février dans FT, ndt].
Il me prend un peu par surprise, je profitais d’un des rares rayons de soleil de février se faufilant à travers les rideaux de dentelle de ce restaurant de poisson du quartier flamand de Bruxelles. Il s’agit de la première interview d’Alexander De Croo depuis qu’il a quitté ses fonctions il y a deux semaines. D’allure relativement décontractée avec sa chemise blanche à col ouvert et son costume bleu marine, il semble, malgré les temps sombres, vraiment convaincu par le titre optimiste de ses récents mémoires : ‘Le meilleur est encore à venir’.
Le libéral flamand se montre même optimiste à propos de ma jambe cassée (un accident de ski), que j’essaie vaillamment de cacher sous la nappe, en m’apprenant qu’il était l’année dernière dans la même station que moi, mais pour faire du snowboard. “Un sport plus sûr, peut-être”, dit-il en riant.
Un sport plus sûr, voilà certainement ce dont l’Europe aurait besoin en ce moment. Les partis de droite, enhardis par l’élection de Donald Trump aux États-Unis, envisagent de nouvelles victoires électorales dans toute l’Union européenne (UE). L’Alternative pour l’Allemagne (AfD), courtisée par l’administration Trump, est en passe de remporter le deuxième plus grand nombre de sièges aux élections fédérales allemandes ce week-end [l’AfD a remporté le score historique de 20,8 % des voix, ndt]. Le nouveau gouvernement belge est lui-même dirigé par un groupe nationaliste de droite.
Pendant ce temps, Donald Trump a lancé une politique agressive de droits de douane et menacé de s’emparer du Groenland, un territoire danois autonome. La semaine dernière, les gouvernements européens ont été stupéfaits lorsque le président américain a entamé des pourparlers de paix bilatéraux avec la Russie, excluant définitivement l’Europe des négociations.
Alexander De Croo revient tout juste de la Conférence de Munich sur la sécurité, au cours de laquelle le vice-président de Donald Trump, J. D. Vance, a suscité l’indignation en s’en prenant aux efforts européens pour prévenir la désinformation et en accusant les dirigeants du bloc de “se présenter dans la peur de [leurs] propres électeurs”.
“Notre produit national est la bière et nous devrions la promouvoir un peu plus.”
Lorsque j’évoque les perspectives du continent, je vois réapparaître le Premier ministre en Alexander De Croo. “Personne ne peut sous-estimer le moment que nous vivons, dit-il gravement. Il y a un risque assez important que l’Europe soit redessinée sans que nous soyons à la table des négociations. Ce qui ne me convient pas, c’est que la réaction européenne jusqu’à présent a été un chaos de colère, de contestation et de blâme.”
Alexander De Croo, qui aime les citations, poursuit : “comme quelqu’un l’a dit un jour, ‘il n’y a qu’une seule façon de gérer sa colère, c’est de faire de son mieux et de prouver que les gens ont tort’. Je suis tout à fait d’accord.”
L’Europe doit élaborer un programme clair, affirme-t-il, en le traçant du doigt sur la nappe beige : “ce que nous devrions faire, c’est dire ‘bien, voici le rôle que nous voulons jouer, et nous n’accepterons pas que l’Europe soit redessinée sans notre présence, mais voici comment nous allons le faire. Voici la proposition que nous faisons, voici les personnes que nous mettons autour de la table’.”
Les considérations politiques sont momentanément reléguées au second plan par le retour du serveur à nœud papillon. Le restaurant qu’a choisi Alexander De Croo se trouve à deux pas du siège de son parti, l’Open VLD, libéral, et est fréquenté par l’homme politique belge depuis des années. Il connaît le propriétaire et a même emmené Angela Merkel ici lors de sa tournée d’adieu en Europe. Il l’apprécie parce que c’est un “bon restaurant”, pas un restaurant “intello”, et qu’il adore le poisson.
Après un bref débat pour savoir si le penchant des Belges pour le poisson et les frites est comparable à celui des Britanniques pour le “fish and chips”, Alexander De Croo passe rapidement la commande en flamand pour nous deux : des croquettes de crevettes traditionnelles et de la sole meunière.
Nous nous mettons également d’accord sur une demi-bouteille de sancerre, bien que mon invité souligne qu’il boit normalement de la bière avec des non-Belges. “Notre produit national est la bière et nous devrions la promouvoir un peu plus.” Il affiche un sourire de guide touristique et me propose de m’envoyer ses recommandations.
À peu près au moment où nous étudions les options de poisson, un petit groupe de dirigeants européens participe à Paris à une réunion de crise organisée par le président français Emmanuel Macron pour discuter de l’Ukraine et de la future défense du continent.
Je demande à Alexander De Croo s’il ne regrette pas déjà de ne plus faire partie de la mêlée. “C’est une question à double tranchant, dit-il en poussant un léger soupir. J’ai apprécié chaque instant des cinq années environ que je viens de passer comme Premier ministre et des quinze années de politique nationale. Et oui, j’ai particulièrement apprécié le volet international de ce travail. Mais par définition, c’est un travail temporaire.”
“J’ai apprécié chaque instant des cinq années que je viens de passer comme Premier ministre. J’ai particulièrement apprécié le volet international.”
Il me rapporte qu’António Guterres, le secrétaire général des Nations unies, qu’il connaît depuis son mandat de ministre belge du Développement, lui a dit : “vous découvrirez qu’être Premier ministre, c’est bien, mais qu’être ancien Premier ministre, c’est encore mieux”. Il marque une pause, puis reprend : “je dois dire que ces deux dernières semaines, je suis d’accord”.
Le serveur arrive avec le sancerre. Il insiste pour que je prenne une photo des deux côtés de la bouteille pour les lecteurs du ‘Financial Times’. “Nous sommes très exhaustifs”, plaisante mon invité.
Fils de Herman De Croo, un ministre belge populaire en poste depuis longtemps, Alexander a grandi en étant déterminé à ne pas suivre son père en politique et à se lancer dans les affaires. Il a étudié l’ingénierie d’affaires à Bruxelles avant d’obtenir un MBA à la Kellogg School of Management de Chicago et de fonder une start-up spécialisée dans les droits de propriété intellectuelle, Darts-ip.
Dans un pays de dynasties politiques (une étude menée l’année dernière a montré qu’environ un député belge sur dix avait des parents dans la politique), Alexander De Croo a déclaré que [le fait que ce soit] le métier de son père était “une raison de ne pas le faire”. Mais après dix ans dans le secteur privé, des amis lui ont lancé un ultimatum après quelques bières : “si c’est pour continuer à dire que tu ne feras jamais de politique, alors on voudrait que tu la fermes. Sinon, ne reste pas sur la touche”. “Ce fut un moment assez important”, conclut-il.
Il s’est présenté aux élections européennes de 2009 et a rapidement gravi les échelons de l’Open VLD, le parti auquel appartenait déjà son père. Entré au gouvernement pour la première fois en 2012, il a été chargé de divers portefeuilles, notamment ceux de ministre du Développement et de ministre des Finances.
En 2020, bien que son parti se soit classé septième aux élections nationales de l’année précédente, il a été appelé à tenter de former un gouvernement. La coalition dite “Vivaldi” qu’il a dirigée a pris le pouvoir au plus fort de la pandémie de covid en septembre 2020. Elle a ensuite guidé la Belgique à travers la crise énergétique européenne et galvanisé le soutien à l’Ukraine, dans lequel la Belgique a joué un rôle prépondérant en tant que siège d’Euroclear, gardienne de 191 milliards d’euros d’actifs russes gelés qui ont servi à garantir un prêt de 45 milliards d’euros à l’Ukraine.
“Nous sommes dos au mur et c’est souvent dans ces moments que l’Europe avance à pas de géant…”
Heureusement pour lui, Alexander De Croo dit “se sentir à l’aise sous la pression”.
Celle qui pèse sur l’Europe devrait, selon l’ancien Premier ministre, être vue comme une opportunité pour les Européens plutôt que comme un motif de d’appréhension. “Nous sommes dos au mur et c’est souvent dans ces moments que l’Europe avance à pas de géant… Tel a été le cas avec le covid. Tel a été le cas avec la crise énergétique et la guerre en Ukraine. Tel a été le cas lorsque nous avons connu la crise financière. C’est dans ces circonstances que nous, Européens, allons de l’avant.”
Un exemple en est l’élan soudain impulsé aux efforts visant à redresser l’économie européenne en perte de vitesse. Il note que des questions épineuses débattues par les ministres de l’UE depuis de nombreuses années, telles que l’union des marchés de capitaux, semblent désormais possibles. Sous la pression des entreprises, les récentes mesures prises par la Commission européenne pour réduire les formalités administratives sont “tout à fait remarquables”, ajoute-t-il.
Fervent défenseur de la politique industrielle lorsque la Belgique a assuré la présidence tournante de l’UE l’année dernière, Alexander De Croo est d’avis que la Commission cesse de se complaire à élaborer des politiques maniaques si l’Europe veut sauver son industrie de sa “dépression maniaque” actuelle.
Nos entrées arrivent et le restaurateur vient vérifier que son client préféré est satisfait. Alexander De Croo m’invite à mettre du citron sur les croquettes, mais lui préfère sans. Je suis docilement son conseil. Elles sont fumantes, onctueuses et garnissent toute l’assiette.
Tout en piquant des morceaux de crevettes avec ma fourchette, j’évoque la nouvelle administration américaine. Alexander De Croo n’a pas rencontré Donald Trump, mais a croisé par hasard Elon Musk, le milliardaire américain chargé par le président de superviser un programme radical de réduction de la réglementation.
La rencontre a eu lieu dans la chambre d’hôtel d’Elon Musk à Stavanger, en Norvège, lorsque les deux hommes s’y sont retrouvés chacun pour des raisons différentes en 2022. En entrant dans la pièce, Alexander De Croo a remarqué dans un coin vingt bouteilles vides de Stella Artois, une bière belge. “J’ai dit qu’il avait l’air d’avoir passé une soirée intéressante. Il a souri et j’ai dit : ‘eh bien, en tout cas avec une bonne bière’.” La Belgique ne possède pas les vastes sites industriels qui auraient intéressé Elon Musk, alors les deux hommes ont parlé de technologie – mon invité est un “nerd” avoué.
À la Chambre des représentants (chambre basse du Parlement fédéral belge), en novembre 2024 - © SIPA
“[Elon Musk] est manifestement un penseur intelligent et il a tendance à partir d’une page blanche, ce qui offre toujours une perspective intéressante.” Je lui demande s’il a remarqué alors des signes indiquant que le milliardaire virait politiquement vers l’extrême droite. “Non”, répond Alexander De Croo. Ils ne sont pas restés en contact ? “Non.”
La Belgique devra relever un défi de taille pour atteindre les objectifs de dépenses de défense qui apaiseront le patron d’Elon Musk, qui souhaite que les pays de l’UE consacrent 5 % de leur PIB à la défense. Le pays y dédie actuellement environ 1,3 %, ce qui le place en bas du classement de l’UE.
L’ex-Premier ministre semble soulagé que ce soit une tâche qui incombe au nouveau gouvernement, mais affirme qu’avec Donald Trump et le passage des États-Unis d’“America First” à “America Only” [de “l’Amérique d’abord” à “l’Amérique seulement”, ndt], il est “tout à fait clair qu’en tant qu’Européens nous sommes seuls”. Au moins, le débat sur les pays européens qui fournissent des garanties de sécurité à l’Ukraine et envoient des troupes sur le terrain a-t-il “mûri”, note Alexander De Croo. “De nombreux dirigeants européens disent : ‘bon, nous sommes prêts à le faire’. Et je pense qu’il le faut.”
Il ajoute que faire participer le Royaume-Uni à la discussion sur la défense est un bon moyen d’ouvrir la porte à une coopération approfondie avec l’ancien membre de l’UE. “Vous pouvez avoir de grandes ambitions et de grands et nobles objectifs, mais vous avez besoin d’un pas en avant et celui-ci est très tangible et opportun.”
On débarrasse nos assiettes ainsi que quelques tranches de pain intactes, et notre sole arrive, dégoulinante de beurre.
Je demande à mon invité de nous ramener à la nuit du 9 juin [dernier, ndt], lorsqu’il a lui-même été victime d’un glissement de l’électorat vers les partis de droite anti-immigrés.
Le résultat a laissé le libéral de 49 ans en charge des seules affaires courantes pendant 236 jours, jusqu’à ce qu’une nouvelle coalition de cinq partis dirigée par son rival nationaliste flamand Bart De Wever soit conclue deux heures avant l’échéance de minuit le 31 janvier. Bart De Wever est un séparatiste qui milite pour une plus grande autonomie de la moitié flamande de la Belgique.
“Nos adversaires du côté conservateur et du côté populiste et nationaliste ont réussi à répandre l’idée que nous ne nous occupions pas des principales questions qui intéressent les gens.”
Je relève que lorsque je me suis installée en Belgique pour la première fois, j’ai été surprise d’apprendre qu’il existait même un débat sur la scission du pays. Alexander De Croo le clôt instantanément : “Le séparatisme ? Ce n’est pas un débat. Personne ne veut diviser le pays… Il a très souvent servi dans des débats politiques où l’on ne veut pas discuter des vrais problèmes.” Il compare la situation actuelle à l’art surréaliste belge. “Nous avons un pays fédéral désormais dirigé par un nationaliste qui croit fermement vouloir diviser le pays, mais n’a rien sur ce point dans son programme gouvernemental… Voilà qui montre la résilience de la démocratie que nous avons.”
Puisque nous commençons à démêler le sujet, je lui demande pourquoi alors les libéraux comme lui sont évincés du gouvernement presque partout en Europe. Les partis centristes refusent-ils les coups bas ? “L’un des aspects sur lesquels nous avons perdu dans les débats politiques, c’est que nos adversaires du côté conservateur et du côté populiste et nationaliste ont réussi à répandre l’idée que nous ne nous occupions pas des principales questions qui intéressent les gens – le pouvoir d’achat, la vie dans les villes, etc., observe-t-il. J’estime que nous y travaillions, mais le populisme est extrêmement doué pour trouver de petits exemples, les amplifier et dire : ‘regardez, voilà ce qui se passe’. Si vous appelez ‘coups bas’ cette attitude, oui, nous n’avons pas encore tout à fait compris comment faire.”
Dans ce cas, les libéraux survivront-ils aux prochaines années ? Alexander De Croo, comme toujours, est optimiste, mais affirme qu’il incombe aux libéraux de mieux communiquer. “L’une des choses que nous devons expliquer, c’est que la démocratie est compliquée, dit-il. La vie n’est pas un film de Disney où il suffit de dire un mot pour que, à la fin, tout le monde sourie et que tout soit résolu.”
Le serveur arrive pour débarrasser les assiettes. Mon invité, déplorant notre tentative ratée de finir les frites, me demande si je veux du pudding, mais nous nous en tenons aux expressos et gardons les assiettes de frites au cas où.
Nous revenons à Angela Merkel, dont le retrait de la vie politique en 2021 a laissé un vide persistant parmi les 27 dirigeants de l’UE, selon Alexander De Croo. Lors des sommets, il arrivait un moment où la chancelière “redressait le dos, et tout le monde se préparait alors à ce qu’elle prenne la parole”. “Dès lors, elle était extrêmement puissante.” Il a également un respect forcé pour le dirigeant autoproclamé “illibéral” de la Hongrie, Viktor Orbán, qui était assis à côté de lui à la table du Conseil de l’Europe. “Il a un raisonnement logique. Ce n’est pas le mien et je ne serais pas d’accord sur grand-chose, mais il est intéressant de comprendre sa logique.” Lorsque je l’interroge sur la possibilité que Giorgia Meloni, la Première ministre d’extrême droite de l’Italie, serve de relais européen à Donald Trump, il répond que l’Italie est l’un des “principaux” pays européens et qu’il n’est donc “pas nouveau” que Rome joue un rôle.
On ne sait pas encore quelle sera la prochaine étape pour Alexander De Croo. Pour l’instant, il a troqué la table du Conseil européen contre des fonctions politiques plus proches de chez lui en devenant maire de sa ville natale, Brakel.
Il envisage également de mettre à profit l’expérience qu’il a acquise en tant que ministre du Développement pour travailler davantage avec l’Afrique subsaharienne. Si les relations avec les États-Unis doivent “être gelées pendant quelques années”, dit-il, les partenariats avec le reste du monde n’en seront que plus importants.
Alors que nous finissons nos cafés, je lui demande si nous devons donc encore espérer que le meilleur reste à venir. “Vous aviez [cette carte] dans votre manche”, gémit-il. “Il y a tant de choses nécessaires et tant de choses possibles”, poursuit-il, notant que nous n’avons pas eu le temps, au cours de notre déjeuner de deux heures, d’aborder la “gigantesque opportunité” de l’intelligence artificielle. “Je crois vraiment que le meilleur est à venir… Ce sera peut-être un peu plus difficile, [mais] ce n’est pas parce que c’est difficile que nous ne devons pas y croire.”
Croquettes de crevettes ×2 : 48 euros Sole meunière ×2 : 90 euros Demi-bouteille de Sancerre : 28 euros Eau gazeuse : 6 euros Expressos ×2 : 12 euros Total (TTC) : 184 euros.
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